Analyse sensorielle : constituer un panel
Comment constituer un panel d’évaluation sensorielle ?
Toute démarche d’analyse sensorielle implique de constituer un panel, c’est-à-dire, d’un groupe d’individus qui testeront les produits et les jugeront selon les règles établies. Ce panel peut être constitué d’experts : des individus entraînés aux analyses demandées & produits concernés. Le panel peut tout aussi bien être composé de sujets plus naïfs, c’est-à-dire sans connaissances spécifiques sur le sujet.
Mais voilà, comment sélectionner des profils ? Qui retenir, qui écarter ? Sur quels critères ? L’objectif est de limiter autant que possible les biais qui pourraient nuire à l’objectivité de l’analyse.
Sélection des profils pour constituer un panel
Critères de sélection d’un panel
Les personnes sélectionnées pour constituer un panel d’analyse sensorielle, devront, au minimum, répondre aux critères suivants :
- démontrer une réelle motivation pour l’analyse choisie (disponibilité, engagement, assiduité…),
- ne pas présenter de répulsion pour les produits à tester,
- ne pas subir de traitement médical (ou s’assurer qu’il n’altère pas la perception sensorielle),
- ne pas avoir de prothèse dentaire (altérant la perception de la texture),
- ne pas présenter de déficience sensorielle : daltonisme, agnosie, agueusie…,
- être en mesure de comprendre et respecter les consignes données (cadre, questions, ne pas se parfumer, fumer, manger avant un test…),
- avoir la capacité d’exprimer clairement ses perceptions et de les mémoriser.
Un échantillon représentatif
Afin que l’étude soit cohérente avec la problématique soulevée, les panélistes ou juges, doivent correspondre à la cible visée. Ainsi, pour constituer un panel, il est possible de ne faire appel qu’à des enfants, ou des hommes et femmes. D’autres panels imposeront un périmètre géographique, un âge, une habitude de consommation, etc.
Par praticité, de nombreuses entreprises commencent par constituer un panel composé de leurs salariés. Si ce choix favorise l’assiduité, cela nuit grandement à l’objectivité. En effet, les personnes d’une entreprise agroalimentaire consomment souvent les produits de l’entreprise régulièrement. Le goût de ces produits comme les valeurs de la marque deviennent alors leur référence, leur standard. Cela implique donc des biais non négligeables à l’étude envisagée.
Entraînement du panel
Par quoi commencer ?
Le premier apprentissage doit être les règles du jeu. Les panélistes doivent comprendre l’objectif de l’entraînement. Ensuite, il est nécessaire d’insister sur l’acquisition des règles de conduite : assiduité, rigueur, régularité, confidentialité, absence de parfum (ou autre arôme parasite), ne pas manger durant les 2 heures précédent la dégustation, le silence…
Pour un panel d’expert, le travail ne s’arrête pas là contrairement à un panel naïf… Viennent alors les séances de génération de vocabulaire. L’objectif est de constituer un lexique déterminant le vocabulaire du groupe : descripteurs & intensités. L’ensemble de ces données devra être transmise par écrit aux panélistes (livret détaillant tous les descripteurs). Chaque juge intègrera ainsi les points à évaluer, les critères de qualité ou de défaut. Grâce à ce travail, une grille d’évaluation sensorielle pourra enfin être créée ainsi qu’une méthode d’analyse.
Le vocabulaire et les échelles définies devront ensuite être testés lors d’analyses sensorielles grandeur nature pour s’assurer de leur pertinence.
Une fois la grille d’évaluation sensorielle arrêtée, l’entraînement du jury démarrera réellement. L’objectif de ces séances est de faire acquérir à chaque juge la même capacité objective de description des perceptions et de leur intensité. Au fur et à mesure des séances, les panélistes devront s’étalonner sur le groupe pour qu’une échelle de 3/5 pour de l’amertume soit la même pour chacun par exemple. Ainsi, les sujets ne respectant pas cette adaptation (notes toujours très supérieures ou très inférieures au groupe) devront être exclus.
Il s’agit de transformer vos dégustateurs amateurs en juges experts dont les résultats sont constants, objectifs et reproductibles.
Certains analystes sensoriels prônent le fait qu’un dégustateur n’a pas besoin de connaître le processus de fabrication du produit pour être de bons évaluateurs sensoriels. Cela est vrai, mais insuffisant. En effet, si un dégustateur expert maîtrise le procédé de fabrication du produit évalué, en plus de décrire ses perceptions, il pourra ajouter en commentaires d’où peuvent venir certains « défauts » ou faiblesses du produit. L’analyse n’en sera que plus pertinente.
Quelle fréquence ?
La question de la fréquence d’entraînement est variable selon le degré d’expertise souhaité et l’échéance à laquelle cette expertise est souhaitée, mais aussi de la disponibilité des juges. Pour tout démarrage de panel, un entraînement hebdomadaire semble un minimum. Les sujet ne pourront ainsi ni saturer, ni trop oublier les notions vues à la séance précédente.
Sachez que l’AFNOR précise qu’une compétence est perdue passée 6 mois sans entraînement… Ainsi, pour entretenir une compétence acquise en évaluation sensorielle, un entraînement mensuel semble le minimum requis.
Avec quels échantillons entraîner le panel ?
Les entreprises agroalimentaires initiant une démarche en analyse sensorielle ont généralement un objectif de contrôle de qualité. Le réflexe est donc de déguster exclusivement ou majoritairement les produits alimentaires fabriqués par l’entreprise. Cela représente un biais considérable nuisant à l’objectivité de l’analyse. En effet, que ce soit conscient ou non, chaque entreprise ou chef a une signature propre assurant une cohérence entre chaque recette. Il est donc nécessaire d’alterner des échantillons comparables, mais de différents producteurs.
Comment indemniser un panéliste ?
La question de l’indemnisation est toujours délicate. En effet, à partir du moment où un panéliste est rémunéré pour sa prestation, son objectivité est remise en question. La rémunération transforme l’évaluation sensorielle en travail et donc en obligation… Ainsi les juges viennent par contrainte plus que par intérêt et on assiste à un désengagement progressif.
Reste donc une gratification ou indemnisation possible donc remercier de l’assiduité ou du travail accompli. Celle-ci a pour coutume de faire par des bons cadeaux ou des produits offerts. ais attention à ne pas oublier de déclarer ces pratiques fiscalement pour respecter la législation en vigueur.
Enfin, l’idéal est de convenir avec vos panélistes d’un échange de bons procédés. En effet, les entraînements sont une formation à l’analyse sensorielle, gratuite. En contrepartie, les panélistes s’engagent à réaliser régulièrement des évaluations sensorielles réelles, en plus des entraînements, dont les données seront exploitées commercialement.
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